Retrouver espoir et solidarité — Diocèse de Carcassonne & Narbonne

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Retrouver espoir et solidarité

Publié le 19/11/2020
Message des Présidents des Conférences Épiscopales de l'Union Européenne aux Institutions européennes et aux États Membres.

Face à la crise qui nous submerge, l'Église Catholique dans l'Union Européenne, représentée par les Présidents des Conférences Épiscopales des États Membres, souhaite adresser un message d'espoir et un appel à la solidarité aux Institutions européennes et aux États Membres. Un message dans lequel nous réaffirmons notre engagement en faveur de la construction européenne qui apporté paix et prospérité à notre continent, et en faveur de ses valeurs fondatrices que sont la solidarité, la liberté, l'inviolabilité de la dignité humaine, la démocratie, l'État de Droit, l'égalité et la défense et la promotion des Droits de l'Homme. Les Pères fondateurs de l'Union Européenne étaient convaincus que l'Europe se construisait dans la crise. Dans notre Foi chrétienne dans le Seigneur ressuscité, nous espérons que Dieu peut transformer toute chose en bien, même celles que nous ne comprenons pas et qui semblent mauvaises. Cette Foi est le fondement ultime de notre espérance et de notre fraternité universelle. En tant qu'Église Catholique dans l'Union Européenne, nous nous joignons aux autres Églises soeurs et aux communautés ecclésiales, pour proclamer et témoigner de cette Foi et, avec les membres d'autres traditions religieuses et les personnes de bonne volonté, nous nous efforçons de construire une fraternité universelle qui n'exclut personne. La Foi nous appelle à sortir de nous-mêmes et à voir en l'autre, en particulier en ceux qui souffrent ou sont en marge de nos sociétés, un frère ou une soeur, mais aussi à être prêts à donner notre vie pour eux.


La pandémie qui nous a frappés ces derniers mois a ébranlé nombre de nos certitudes et a révélé notre vulnérabilité et notre interdépendance. Les personnes âgées et les pauvres du monde entier sont ceux qui ont le plus souffert. À cette crise qui nous a surpris et pris au dépourvu, les pays européens ont d'abord répondu par la peur, en fermant les frontières nationales et extérieures, certains refusant même de partager entre eux les fournitures médicales dont ils avaient grand besoin. Beaucoup d'entre nous craignaient que l'Union Européenne elle-même, en tant que projet économique, politique, social et culturel, ne soit en danger. Nous avons alors réalisé, comme l'a dit le pape François, que nous sommes dans le même bateau et que nous ne pouvons nous sauver qu'en restant ensemble. Avec une détermination renouvelée, l'Union Européenne a commencé à répondre de manière unie à cette situation dramatique. Elle a démontré sa capacité à redécouvrir l'esprit des Pères fondateurs. L'instrument de relance face au COVID-19 et le budget renforcé de l'UE pour 2021-2027, qui ont été convenus lors de la réunion du Conseil européen de juillet et qui sont actuellement négociés entre le Conseil et le Parlement européen, refléteront, espérons-le, cet esprit.


L'avenir de l'Union Européenne ne dépend pas seulement de l'économie et des finances, mais aussi d'un esprit commun et d'une nouvelle mentalité. Cette crise est une opportunité spirituelle de conversion. Nous ne devons pas simplement consacrer tous nos efforts au retour à la "vieille normalité", mais profiter de cette crise pour apporter un changement radical pour le mieux. Elle nous contraint à repenser et à restructurer le modèle actuel de la mondialisation en garantissant le respect de l'environnement, l'ouverture à la vie, le souci de la famille, l'égalité sociale, la dignité des travailleurs et les droits des générations futures. Le Pape François, avec son Encyclique Laudato Si’, nous a montré la voie pour façonner une nouvelle civilisation. Dans sa nouvelle Encyclique Fratelli tutti, signée il y a quelques semaines sur la tombe de Saint François d'Assise, il appelle l'humanité entière à la fraternité universelle et à l'amitié sociale, sans oublier les marginaux, ceux qui sont blessés et ceux qui souffrent. Les principes de la Doctrine Sociale de l'Église Catholique de dignité humaine et de solidarité, tout comme l'option préférentielle pour les pauvres et la durabilité, peuvent devenir les principes directeurs pour construire un modèle d'économie et de société différent après la pandémie.


La solidarité est un principe fondamental de la Doctrine Sociale de l'Église et est au coeur du processus de l’intégration européenne. Au-delà des transferts internes de ressources au profit des politiques de cohésion, la solidarité doit être comprise en termes de faire ensemble et d’ouverture à l'intégration de tous, en particulier de ceux qui sont en marge de nos sociétés. Dans ce contexte, il convient de mentionner que le vaccin contre le COVID-19, lorsqu'il sera disponible, devra être accessible à tous, en particulier aux pauvres. Robert Schuman a expliqué que les nations, loin d'être autosuffisantes, devraient se soutenir mutuellement et que la solidarité est la conviction que le véritable intérêt de chacun est de reconnaître et d'accepter dans la pratique l'interdépendance de tous. Pour lui, une Europe unie préfigure la solidarité universelle au niveau mondial sans distinction ni exclusion. La déclaration Schuman souligne dès lors la responsabilité particulière de l'Europe pour le développement de l'Afrique. Dans le même ordre d'idées, nous demandons dès à présent que l'aide humanitaire et la coopération au développement soient renforcées et que les dépenses militaires soient réorientées vers la santé et les services sociaux.

La solidarité européenne doit s'étendre de toute urgence aux réfugiés qui vivent dans des conditions inhumaines dans les camps et sont gravement menacés par le virus. La solidarité envers les réfugiés signifie non seulement le financement, mais aussi l'ouverture proportionnelle des frontières de l'Union Européenne, par chaque État Membre. Le Pacte sur la migration et l'asile présenté par la Commission européenne peut être considéré comme une étape vers l'établissement d'une politique européenne commune et juste en matière de migration et d'asile, qui doit être soigneusement évaluée. L'Église a déjà exprimé son avis sur l'accueil, en distinguant les différents types de migration (régulière ou irrégulière), entre ceux qui fuient la guerre et les persécutions et ceux qui émigrent pour des raisons économiques ou environnementales, et la nécessité de garder à l'esprit les questions de sécurité. Nous pensons toutefois qu'il existe certains principes, valeurs et obligations juridiques internationales qui doivent toujours être respectés, quelles que soient les conditions des personnes concernées, des principes d'action et des valeurs qui sont à la base de l'identité européenne et qui trouvent leur origine dans ses racines chrétiennes. Nous recommandons également de faciliter des voies sûres et légales pour les migrants et des couloirs humanitaires pour les réfugiés, grâce auxquels ils pourront venir en Europe en toute sécurité et être accueillis, protégés, soutenus et intégrés. Dans ce sens, il convient de collaborer avec les institutions ecclésiastiques et les associations privées qui travaillent déjà dans ce domaine. L'Europe ne peut et ne doit pas tourner le dos aux personnes venant de zones de guerre ou d'endroits où elles sont victimes de discrimination ou ne peuvent mener une vie digne.


Un élément crucial pour l'Église dans de nombreux États Membres pendant la pandémie est le respect de la liberté de religion des croyants, en particulier la liberté de se réunir pour exercer leur liberté de culte, dans le plein respect des exigences sanitaires. Cela est encore plus évident si l'on considère que les oeuvres de bienfaisance naissent et sont également enracinées dans une Foi vivante. Nous déclarons notre bonne volonté de maintenir le dialogue entre les États et les autorités ecclésiastiques pour trouver la meilleure façon de concilier le respect des mesures nécessaires et la liberté de religion et de culte. On a souvent dit que le monde sera différent après cette crise. Ce sera à chacun de nous de décider si ce sera pour le mieux ou le pire, si nous sortons renforcés de cette crise par la solidarité ou non. Pendant ces mois de pandémie, nous avons été témoins de tant de signes qui nous donne de l’espoir, du travail du personnel de santé, à celui de ceux qui prennent soin des personnes âgées, aux gestes de compassion et de créativité des paroisses et des communautés ecclésiales. Beaucoup, en ces mois difficiles, ont dû faire des sacrifices considérables, renonçant à rencontrer leurs proches et à être à leur côté dans les moments de solitude et de souffrance et parfois même de mort. Dans son message Urbi et Orbi du dimanche de Pâques, le Pape François s'est adressé en particulier à l'Europe, rappelant qu'après « la deuxième guerre mondiale, ce continent a pu renaître grâce à un esprit concret de solidarité qui lui a permis de dépasser les rivalités du passé ». Pour le Pape, « il est plus que jamais urgent […] que ces rivalités ne reprennent pas vigueur, mais que tous se reconnaissent membres d’une unique famille et se soutiennent réciproquement. Aujourd’hui, l’Union Européenne fait face au défi du moment dont dépendra, non seulement son avenir, mais celui du monde entier ».


Nous assurons à tous ceux qui dirigent et travaillent dans les Institutions européennes et les États Membres que l'Église est à vos côtés dans notre effort commun pour construire un avenir meilleur pour notre continent et le monde. Nous soutiendrons toutes les initiatives visant à promouvoir les valeurs authentiques de l'Europe. Nous espérons que cette crise nous rendra plus forts, plus sages, plus unis, plus solidaires, plus soucieux de notre maison commune, et que l’Europe montrera au monde entier le chemin vers plus de fraternité, de justice, de paix et d'égalité. Nous prions pour tous et vous donnons de tout coeur notre bénédiction. Que le Seigneur nous accompagne dans notre pèlerinage vers un monde meilleur !


S.Em. Gualtiero Cardinal Bassetti, Archevêque de Perugia-Città della Pieve, Italie
S.E. Mgr Dr. Georg Bätzing, Evêque de Limburg, Allemagne
S.Em. Jozef Cardinal De Kesel, Archevêque de Malines-Bruxelles, Belgique
S.E. Mgr Éric Marie de Moulins d’Amieu de Beaufort, Archevêque de Reims, France
S.E. Mgr Stanisław Gądecki, Archevêque de Poznań, Pologne
S.E. Mgr Jan Graubner, Archevêque d’Olomouc, République Tchèque
S.E. Mgr Gintaras Linas Grušas, Archevêque de Vilnius, Lituanie
S.Em. Jean-Claude Cardinal Hollerich, S.J., Archevêque de Luxembourg, Président de la COMECE
S.E. Mgr Philippe Jourdan, Administrateur Apostolique, Estonie
S.E. Mgr Czeslaw Kozon, Evêque de Copenhague, Danemark, Épiscopat nordique
S.E. Mgr Dr. Franz Lackner, O.F.M., Archevêque de Salzburg, Autriche
S.E. Mgr Eamon Martin, Archevêque d’Armagh, Irlande
S.E. Mgr José Ornelas Carvalho, S.C.I., Evêque de Setúbal, Portugal
S.Em. Juan José Cardinal Omella Omella, Archevêque de Barcelone, Espagne
S.E. Mgr Aurel Percă, Archevêque de Bucarest, Roumanie
S.E. Mgr Christo Proykov, Evêque éparchal de Saint Jean XXIII de Sofia, Bulgarie
S.E. Mgr Želimir Puljić, Archevêque de Zadar (Zara), Croatie
S.E. Mgr Sevastianos Rossolatos, Archevêque d’Athènes, Grèce
S.E. Mgr Charles Jude Scicluna, Archevêque de Malte
S.E. Mgr Youssef Antoine Soueif, Archevêque de Tripoli del Libano (Maronite), Chypre
S.E. Mgr Viktors Stulpins, Evêque de Liepāja, Lettonie
S.E. Mgr Johannes H. J. van den Hende, Evêque de Rotterdam, Pays-Bas
S.E. Mgr András Veres, Evêque de Győr (Raab), Hongrie
S.E. Mgr Stanislav Zore, O.F.M., Archevêque de Ljubljana, Slovénie
S.E. Mgr Stanislav Zvolenský, Archevêque de Bratislava, Slovaquie

 

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