La vie consacrée, témoignage de communion — Diocèse de Carcassonne & Narbonne

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La vie consacrée, témoignage de communion

Retrouvez le message d'une chanoinesse régulière de la Mère de Dieu pour la Journée Mondiale de la Vie Consacrée de cette année 2023.
La vie consacrée, témoignage de communion

 

La vie consacrée est placée au cœur même de l’Eglise pour manifester le mystère du Christ et plus précisément, « faire comprendre la nature intime de la vocation chrétienne »[1]. Même si quelques-uns seulement y sont appelés, elle nous concerne donc tous, en tant que signe. Une communauté de consacrés est une icône de l’Eglise, une « ecclesiola », une petite église. Tout en elle doit tendre à rayonner le mystère même de l’Eglise, et particulièrement, « la tension de toute l’Eglise-Epouse vers l’union avec l’unique Epoux. »[2]

Saint Augustin, dont la Règle est restée une référence pour nombre de communautés religieuses − comme c’est le cas de notre communauté canoniale − a merveilleusement enseigné comment réaliser cette « tension » d’amour vers le Seigneur Dieu : « Ayez une seule âme et un seul cœur, tendus vers Dieu, "in Deum" »[3]. Oui, pour aimer Dieu en vérité, il nous faut « nous aimer les uns les autres », « être un » dans la diversité et la communion. C’est le grand défi de l’amour du prochain, que Jésus nous a commandé[4], au même titre que l’amour de Dieu, et sans lequel cet amour de Dieu est « menteur » (1Jn 4,20).

La vie fraternelle d’une communauté religieuse en tant que « vie partagée dans l’amour », est « signe de la communion ecclésiale »[5]. Elle demande à chacun d’être disponible pour accueillir l’autre tel qu’il est, sans le « juger » (cf Mt 7,1-2), capable de pardonner même « soixante-dix fois sept fois » (Mt 18,32)[6]. Cela n’est possible que parce que Dieu se fait source de cet amour, qui est répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné  (cf Rm 5,5). C’est précisément Lui, l’Esprit, qui introduit l’âme dans la communion avec Dieu, source même de la vie fraternelle. Et ce labeur quotidien – car nous le savons tous, s’aimer dans nos différences n’est pas facile – contribue à l’évangélisation, parce qu’il montre « de façon concrète les fruits du commandement nouveau »[7]. Saint Augustin différencie volontiers dans ses enseignements l’unité et l’uniformité. Il ne s’agit nullement d’un nivellement. C’est une unité qui est faite de pluralité, cette pluralité cherchant à s’élever jusqu’à l’unité, l’unité du Christ.[8] Augustin aime l’image du pain, le pain eucharistique : « Nombreux, nous sommes un seul Corps. Rappelez-vous que le pain ne se fait pas avec un seul grain, mais avec beaucoup de grains (…) mouillés d’eau pour parvenir à l’unité… ».[9]

Oui, l’Eglise a besoin « de communautés fraternelles dans lesquelles l’attention mutuelle aide à dépasser la solitude, la communication pousse chacun à se sentir co-responsable, et le pardon cicatrise les blessures » afin de manifester par-là « son vrai visage »[10]. Le Pape François, dans sa Lettre Apostolique aux consacrés, en 2014, était clair : « Les consacrés sont appelés à être "experts en communion". J’attends par conséquent que la "spiritualité de la communion", indiquée par S. Jean-Paul II, devienne réalité, et que vous soyez en première ligne pour recueillir le "grand défi qui se trouve devant nous en ce nouveau millénaire : faire de l’Eglise la maison et l’école de la communion". »[11]

Saint Augustin voit l’Eglise comme la réunion de ceux qui, engendrés par le baptême à la vie nouvelle, « doivent être rassemblés en un par l’Unique »[12]. Il s’agit non pas d’une unité née d’une simple amitié humaine : elle n’est pas partage des sentiments, des goûts, mais bien plus profonde[13]. C’est une unité réalisée par le Saint-Esprit. Et les consacrés comme tous les baptisés, en tendant à cette caractéristique de toute l’Eglise, répondent à une vocation divine, car  c’est « le cri de Dieu, le cri de l’Esprit-Saint »[14] qui retentit dans le psaume 132 : « Voyez qu’il est bon, qu’il est doux pour des frères d’habiter en un ! ». « C’est la grâce de Dieu qui fait que les frères habitent en un : cela ne vient pas de leurs forces, ni de leurs mérites, mais cela vient du don qu’il leur fait, cela vient de sa grâce, comme la rosée descend du ciel. (…) Vous tous qui voulez habiter en un, souhaitez cette rosée, laissez-vous ensemble pénétrer par elle. »[15]

C’est aussi la prière poignante de Jésus, au moment de passer de ce monde au Père : « Qu’ils soient parfaitement un, et que le monde sache que tu m’as envoyé ! » (Jn 17,23).

 

Une chanoinesse d’Azille

 

 

 

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[1]  Concile Vatican II, Ad Gentes, n.18 ; cité dans Vita consecrata, n.3.

[2] Saint Jean-Paul II, Vita consecrata, n.3.

[3] Règle de saint Augustin, I,1. Cf Actes des Apôtres 4,32.

[4] Cf Mt 22,37-40 ; Jn 13,34.

[5] Saint Jean-Paul II, Vita consecrata, n.42.

[6] Cf S. Jean-Paul II, Vita consecrata, n.42.

[7] Saint Jean-Paul II, Vita consecrata, n.45.

[8] Cf M.-Fr. Berrouard, cité par Sœur Marie Ancilla, op, La Règle de saint Augustin, Cerf 1996, p. 85.

[9] Sermon 272.

[10] Saint Jean-Paul II, Vita consecrata, n.45.

[11] Pape François, Lettre Apostolique à tous les consacrés, à l’occasion de l’Année de la vie consacrée, 21 novembre 2014, n.3. Cf Saint Jean-Paul II, Lettre Apostolique Novo millenio ineunte du 6 janvier 2001, n.43, et Vita consecrata, n.46.

[12] Sermon 195,2.

[13] Cf Sœur Marie Ancilla, op, La Règle de saint Augustin, Cerf 1996, p. 81. Cf Confessions, IV, 4, 7.

[14] Saint Augustin, Commentaire du psaume 132, 2.

[15] Saint Augustin, Commentaire du psaume 132, 11.